Sable & Sang [libre]

En ce jour, tout allait changer, Kyôran le savait, il l'avait compris au moment même où son bras s'était levé sur son sensei venu lui parler, seulement lui parler, sans haine ni animosité aucune, juste pour le comprendre. Quelle stupidité que cette tendance à vouloir tout comprendre ! Les shinobi mettent des mots là où il n'en faudrait pas, car ils paraissent futiles. Ressentir suffit, pourquoi parler ? Tant de question qui effleuraient l'esprit du Jounin sans y rester, passant et filant comme le vent soufflant dans le désert blanc de Suna.
Il venait de sortir de chez lui, comme si de rien n'était, mais il savait que si son sensei n'était pas retrouvée, elle mourrait très certainement, d'ailleurs c'était peut-être déjà le cas au moment même où il hésitait à quitter définitivement ce village qui lui donnait la nausée. Il n'irait dans aucun autre, car son sentiment serait le même, il errerait simplement, faisant sa loi. Lassé d'obéir à un Kage qui pense mieux que les autres où est le bien et où il s'arrête, alors même qu'il est un homme comme les autres. "Pour le bien du village", "pour le bien de ses citoyens"... des raisons donnés pour tuer ou mettre sa vie en jeu dans des missions périlleuses qui reviennent chaque fois et sont toujours aussi vagues.

Il devait se retenir pour ne pas bondir sur le premier Shinobi qu'il croisait pour se battre avec lui. Plus Kyôran le sentait puissant, plus son envie était forte. Le but de cette volonté de combattre ? Il n'en avait aucun, aucun qu'il puisse expliquer ou justifier. C'était aussi pour cela qu'il ne se sentait plus à sa place dans le village, et si Emi, la personne qui avait réussi à être la plus proche de lui n'était pas arrivé à le faire parler et à lui ôter ce malaise, personne ne le pourrait. Quant à la considérer "proche" de lui, c'était toutefois exagéré. Elle lui parlait, et il lui répondait, c'est en ce sens seulement qu'il l'estimait proche, presque déjà trop.

Descendu dans la rue, il marchait dans les allées ensablées du village. Objectivement, les rues étaient agréables, quoique un peu chaudes en ces temps estivaux, mais cela lui était égal. Qu'est-ce que cela pouvait bien lui apporter puisqu'il vivait la plupart du temps ailleurs à cause de ses missions ?
En parlant de mission, il serait peut-être bien d'aller en demander une, cela laisserait le temps aux jounin du village de s'inquiéter de la disparition d'Emi, puis de la trouver. A son retour, il serait peut-être attendu avec le comité d'ANBU, conduit en prison, torturé... Cela lui faisait peur ? Non, même pas. Il se moquait de sa vie comme du premier criminel qu'il aait massacré en mission.

Il s'apprêtait à tourner dans la rue principale pour aller dans les bureaux du Kazekage, quand il heurta quelque chose. Baissant les yeux, il vit un Genin, certainement fraichement promu, qui avait reculé de quelques pas sous le choc.

"Hey ! Regardez devant... " commença le jeune imprudent. Mais il s'arrêta net en voyant que non seulement il avait un jounin devant lui, mais qu'en plus il s'agissait de moins apprécié de tous.

N'attendant pas qu'il termine ni s'excuse, Kyôran l'attappa par le col de sa tunique pour l'attirer à lui.

"Désires-tu que je t'enseigne les bonnes manières, petit ? Il serait dommage que dès tes premiers jours de Shinobi tu disparaisses brusquement dans la nature... n'est-ce pas ?" souffla le jounin.

Voyant l'air terrifié du genin qui ne savait pas comment prendre cette réplique, Kyôran se mit à rire.

"Je vais te laisser un peu de répits, j'ai déjà mangé ce matin... mais veilles à ne plus trainer dans mes pattes !" acheva-t-il d'un ton sec.

Il lâcha l'élève qui partit en courant en bafouillant quelque chose que Kyôran ne comprit pas, et ne chercha même pas à comprendre.

Le gamin avait détalé rapidement, mais Kyôran avait ressentit une autre présence, proche de lui, et qui peut-être serait amenée à l'interpeler. Etant jounin depuis quelques années, il avait appris à ressentir ce genre de chose. Le poste d'ANBU lui avait toujours été refusé pour son manque de stabilité, mais les dirigeants s'accordaient à dire qu'il avait néanmoins des qualités de combat indéniables.

Shinobis ! je vois beaucoup de haine en toi, qui es-tu ?

La voix provint effectivement de l'homme... ou plutôt du jeune homme qu'il avait repéré. N'importe qui a sa place se serait posé plusieurs questions essentielles, par exemple "qui était cet homme ?", ou "était-il puissant?" ou encore "quelle est son ambition?" ... Mais Kyôran s'en moquait bien, rien ne lui passa par la tête si ce n'est l'envie de ne surtout pas rester là à parler de la pluie et du beau temps avec ce type.
Il voyait de la haine ? Grand bien lui fasse...

L'intéressé se retourna pour être face au jeune homme qui lui avait adressé la parole.

"Shinobi... ? Tu fais erreur..." commença-t-il, se doutant qu'il allait semer le trouble dans l'esprit de son interlocuteur. "Je me nomme Kyôran."

L'humour était facile, noir et quelque peu... provoquant. Sans nulle doute qu'il le prendrait mal.

"Je n'ai pas de haine. Je rendais service à ce jeune, en lui apprenant à éviter le danger. Cela lui servira... plus tard." expliqua-t-il, se moquant bien de savoir si le jeune homme allait comprendre ou rester borné sur son idée.

"Je ne peux rester... J'ai faim" dit-il finalement, se dirigeant vers la rue d'en face d'un pas lent, nonchalant, mais avec cette attitude froide et austère qui le caractérisait.

Qu'il le suive, lui parle, l'arrête, ou le laisse filer n'importait que peu, cela le laisserait de marbre. Kyôran n'avait ni rêve ni attente, juste ce que l'on nommerait des pulsions, qui pourtant sont réfléchies, malgré les apparences.

Sache que je ne
parle pas de tes actes Kyôran, mais de ton esprit ! ton coeur ! ton âme
... sa fait longtemps n'es ce pas que tu hais le monde entier ... ?

Le jounin découvrit ses dents blanches, comme la très grande majorité des Shinobi (pour ne pas dire tous...), cet individu jugeait sans connaitre, prétendait lire dans les coeurs, et avançait avec fierté sa recherche d'une prétendue paix ou justice, des mots qui en sortant de leur bouche, ne signifient rien.

"Je ne vais pas m'évertuer à affirmer que tu te trompes, car de toute façon tu as déjà fait ton opinion. Je n'aime pas me battre contre des moulins à vent."

En l'occurrence, le vent c'était un peu les paroles et les actes du jounin.

Tu aimerais être Anbu n'ai-je pas raison ? Tu n'aimes pas les ordres et pourtant tu restes sous la tutelle d'un Kage.
Des actes dérisoire dans un esprit désordonné ...

Le sourire s'atténua, mais il leva un sourcil, étonné. Que disait-il ce piètre individu ? Il s'avançait alors vers Kyôran.

Je suis comme toi Kyôran !!! ...

Oui... et ? Que voulait-il dire ? Comment comparer deux choses lorsque l'on n connait pas l'une des deux ?

Mais tu finiras déjà par t'en apercevoir.

Joignant le geste à la parole, son interlocuteur sortit quelques kunai et les lui lança. D'un geste presque nonchalant, Kyôran dégaina son sabre court attaché sur son dos, également appelé "nintô", et fit ricocher les kunai sur la lame pour dévier leur trajectoire.

"Tu cherches quoi ?" demanda Kyôran qui commençait à être las des attitudes provocantes de son interlocuteur, qui prenait bien le chemin pour devenir son adversaire.

Avait-il une hallucination ou les yeux du jounin venaient de changer de couleur ? Méfiant face à d'éventuels genjutsu, il baissa légèrement le regard, le fixant au niveau du ventre du jounin. En effet, tout mouvement commençant par les hanches, il pourrait réagir vite et bien, sans avoir les risques des éventuels genjutsu provoqué par des doujutsu dont il connaissait la puissance.

"Tu veux te battre ? Est-ce bien sérieux ... Tu risquerais d'être destitué de ton grade..." lança Kyôran avec un sourire au coin des lèvres.

Avait-il fait fausse route de la même façon qu'il était persuadé que l'ANBU (de mémoire, c'en était un) s'était trompé à son sujet ?

Il fallait bien
que j'attire ton attention Kyôran ! sinon tu ne serais pas là à
m'écouté débité quelques conneries ! mais écoute attentivement mes
paroles. Je ne cherche pas d'ennemis ! je cherche quelqu'un de puissant
et hostile à se système répugnant. Je cherche un allier ! un allier qui
me donnera sa loyauté, comme je le ferai en retour. Il n'y aura pas de
chef mais deux shinobis hors du commun qui s'entre aide, même dans la
mort. Je cherche quelqu'un qui le jour venus sera prêt à me suivre pour
renversé cette nation dirigée par des vieux éclasiasthiques !

Les deux derniers mots de son interlocuteur poussèrent le jounin à en savoir d'avantage, mais il savait également que la personne que recherchait cet individu n'était pas lui, il ne correspondait en rien au profil de quelqu'un de loyal. Chaotique était d'avantage un mot pour qualifier son comportement.

Avant qu'il ne puisse rétorquer quelque chose, le jeune homme s'avança, saisit la lame de Kyôran pour l'appuyer sur sa propre gorge, comme un signe d'honnêteté et d'une conviction sans faille.

Je n'ai pas peur
de mourrir, mes paroles ne sont pas sans fonds ! Kyôran tu es puissant
et un fin stratège, laisse moi te servir et en échange détruisons ceux
qui se mettent devant notre chemin ... nous ne sommes pas obligés de
resté dans ses lieux, nous pourrons créer notre propre société ! mais
pour l'instant restons caché dans l'ombre et attendant le jour propice.

"Lâches cette arme, je n'ai nul besoin de ça pour te croire, tout comme prendre ta vie ne m'avancerait à rien." rétorqua-t-il.

Il garda quelques secondes le silence, le temps d'analyser ce que voulait cet homme, ou plutôt ce qu'il disait vouloir. Finalement, Kyôran se décida à répondre, avec sérieux, ce qui déjà était une chose rare chez lui...

"Ton objectif réel, c'est quoi ? Créer une société dans laquelle tu finisses par reproduire la même hiérarchie qu'ailleurs ? Serais-tu utopiste au point de croire que les hommes n'ont pas besoin d'un chef ? On recherche tous le pouvoir, sous des formes différentes... tu ne peux pas enlever cela à l'Homme, et en particulier aux Shinobi, à moins de changer leur nature, ce qui est naturellement infaisable. De toute façon, quand bien même je serais d'accord avec ton objectif, je ne pourrais pas me joindre à toi, je ne suis loyal envers personne. Si tu veux qu'on marche côte à côte, il faut que tu saches que le jour où tes agissement ne me plairont plus, ou bien le jour où je m'ennuierai, alors je partirais et je te laisserai tomber dans aucun remors."

Sa propre franchise l'étonnait, mais finalement, il était juste imprévisible, même pour lui-même.

"Ce n'est pas ce genre de type que tu recherches, n'est-ce pas ?"

Il rangea son nintô dans son fourreau, fixant son interlocuteur comme pour percer ses véritables intentions.
Se laissant aller à exprimer son avis, il ajouta en souriant face à l'ironie de cette situation :

"Un ANBU cherchant à tromper son village... refusant la loyauté qu'il doit à son Kage...Car tu es bien ANBU n'est-ce pas ? Recemment prômu si je ne me trompe pas... Comment puis-je être sûr que tu ne me manipules pas de la même façon que tu les manipulent eux ?"

La question était intéressante, mais pas autant que le serait la réponse.